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    Au mois d’août dernier , entre autres pèlerinages sur les pas de mon enfance je suis allé à la recherche des vestiges de mon premier job d’étudiant…il n’en reste rien …50 ans après…que le souvenir….

     

     

    Eté 1961..

     

    Pendant deux mois , je serai barman au « BAR-DANCING DE LA MARINE » à

    Saint-Vaast-la Hougue . J’ai trouvé ce boulot avec l’appui d’un ami de la famille….
    J’achète mon billet à la gare routière en face de la gare SNCF et prend place à bord du vieil autobus qui sillonne le Val-de-Saire à l’est de Cherbourg.

    Cahin-caha après quarante kilomètres et moult virages , nous passons Barfleur et nous engageons sur la longue ligne droite en bord de mer qui se termine à St-Vaast.

    Je descend ma valise à la main et me dirige vers la dernière maison au bout du quai.

    Une maison blanche d’un étage , le rez-de-chaussée entièrement occupé par le café , devant , sur le trottoir , quelques chaises et tables sous leur parasol Orangina…une large baie vitrée ouvre sur le port, surmontée sur toute sa longueur d’une pancarte où l’on peut lire à la peinture bleue : BAR DANCING DE LA MARINE.

     

    J’entre et me présente au maître des lieux , personnage rigolard occupé à essuyer des verres derrière son comptoir.

    Monsieur C. –ravi de me connaître- ..il passe la main sur le derrière de son pantalon et me tend deux doigts…- Monsieur N. lui a beaucoup parlé de moi – pas mécontent d’avoir de l’aide – les mois d’été on est toujours débordés – les vacanciers ne vont pas tarder à arriver – qu’est-ce que je vous sers ? – je suis sûr que nous allons former une bonne équipe – je vais vous présenter Madame C….- il me présente Madame C. , une petite femme rondouillarde à cheveux noirs…ni l’un ni l’autre ne me paraît avoir dépassé la trentaine , elle appelle le neveu en vacances , un petit rouquin à lunettes d’une dizaine d’années , cheveux en brosse , visage criblé de taches de rousseur et l’air chafouin , - dis bonjour au Monsieur !- il dit bonjour au Monsieur et repart en courant.

    Maintenant , parlons des conditions…- je ne serai pas payé…j’aurais mes pourboires…je serai nourri et logé dans une chambre au-dessus….les horaires…10 heures du matin – 4 heures du matin…tous les jours sauf le lundi – jour de repos – voilà je crois qu’on a tout vu – si vous êtes d’accord , vous commencez tout de suite - ..Je suis d’accord.

     

     

    Le temps de poser ma valise dans ma chambre , d’enfiler un pantalon bleu marine que j’ai pris soin d’amener , de passer une chemise blanche , de nouer une cravate noire (fournie) d’essayer une veste blanche (fournie et qui me serre un peu aux épaules) , je suis fin prêt , il ne me reste plus qu’à descendre et me mettre aux ordres…

     

    Saint Vaast ...


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    C’était le temps des copains…..en 63…j’avais 20 ans…

    Joker me replonge dans ma toute jeunesse avec sa balade en 2CV dans les Balkans…

     

    Nous devions partir à six dans une paire deDeudeuches…..un désistement de dernière minute nous a ramenés à 5….nous l’avions longuement préparée cette expédition….d’interminables soirées pendant de longs mois à peaufiner le moindre détail….à faire plein de petits boulots pour la financer….deux mois d’aventures qui allaient nous mener à travers la France , l’Italie , la Yougoslavie (très dure à l’époque)…la Grèce du nord au sud….le bateau jusqu’à Brindisi…l’Italie du sud au nord et retour sur Paris…..ce n’était pas la Croisière jaune…mais presque….que de souvenirs picaresques….je m’en souviens comme si c’était hier…j’aurais beaucoup d’anecdotes à rapporter…un jour il faudra que je m’y attelle…..c’est sans nul doute le point de départ de mon goût immodéré pour l’ailleurs…

     

    Le temps des copains ...


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    A l’époque où j’étais étudiant

    et passais le clair de mon temps et de ma vie au quartier Latin , nous avions la chance de profiter d’une foule de manifestations estudiantines plus ou moins traditionnelles et folkloriques .

     

    Il y en avait une en particulier que je n’aurais ratée sous aucun prétexte….c’était le ROUGEVIN….une manifestation qui marquait la fin du bizutage et l’intégration définitive des bleus au sein de la Grande Ecole des Beaux Arts de Paris.

    Autant que je m’en souvienne , cela se passait au début février à l’époque du carnaval…pendant les mois précédents les bizuths des Beaux Arts et de Spécial Archi se sont évertués à fabriquer de magnifiques chars de carnaval tous avec un seul et unique thème décliné à toutes les sauces….. le PHALLUS…des sexes énormes et variés …une pornographie gargantuesque paillarde et bon enfant…

     

    Le défilé partait du Quai Malaquais (siège de l’Ecole) au son tonitruant des fanfares , dont la nôtre (Arts Déco) aimablement invitée chaque année avec celle des Métiers d’Arts à participer aux agapes. Le cortèges de chars avec ses bites géantes et multicolores se balançant au-dessus de la foule , tirés par les bizuths costumés , escortés des élèves déguisés eux aussi , longeait la Seine avec vacarme et délire collectif , jusqu’au Boulevard Saint Michel qu’il remontait sous les chants les plus paillards repris en cœur par des milliers de choristes improvisés….arrivés au Luco (au Luxembourg) , la cohorte en folie bifurquait dans la rue Soufflot jusqu’au Panthéon où les chars étaient embrasés en un gigantesque feu de joie…la fête se poursuivait en général dans les Jardins du Luxembourg pour se terminer jusqu’à pas d’heure dans les bistrots du quartier….Cette tradition comme bien d’autres a été interdite à la fin des années 60....jugée trop dangereuse…j’ai la consolation d’avoir eu l’honneur et le privilège d’assister ou de participer aux presque dernières…quand il m’arrive aujourd’hui d’aller traîner dans les rues de mon ancien quartier j’ai toujours dans l’oreille le lointain écho de ces fêtes , et quand je promène le regard autour de moi je trouve le décor devenu bien gris...bien triste…beaucoup trop sérieux…avec une pensée assassine pour les pisse-froid législateurs..

     

     

    Photo Paris 1966

     

    Rougevin ...


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    Plage Napoléon ...En ce même endroit

    je venais faire des châteaux de sables

    ma mère avait amené son tricot ,

    assise sur une serviette ,

    sous son grand chapeau de paille ,

    elle nous surveillait , ma sœur et moi

    par-dessus ses lunettes de soleil…

    j’avais le béret enfoncé jusqu’aux oreilles

    et la chemisette boutonnée jusqu’en haut

    pour éviter insolation et coups de soleil….

    elle avait un panier près d’elle ,

    renfermant notre goûter et de la limonade tiède…

    nous attendions impatiemment 15 heures….

    que la digestion du repas de midi soit terminée

    pour aller se tremper sans risques…..

    le port de plaisance Chantereyne s’appelait alors plage Napoléon…

     

    J’y suis revenu très souvent…tout au long de l’adolescence….regarder en rêvant les grands transatlantiques quitter la Gare Maritime…prendre la passe pour sortir de la rade et disparaître à l’horizon après trois coups de sirènes en guise d’au-revoir..

     

     


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    Fin de la guerre d’Algérie…

    l’OAS multiplie les attentats, des bombes explosent un peu partout , entre autre dans le quartier St Germain.

    Le métro s’immobilise le long du quai de la station Sèvres-Babylone , c’est là que je descend tous les matins avant de me rendre rue du Dragon.

    Ce jour là , la guirlande de voyageurs attendant de monter a fait place à un inquiétant cordon de CRS…noirs et casqués , bras croisés , …les portes du wagon coulissent dans un soupir interrompu d’un claquement sec. Avec d’autres , je descends…sous le bras, mon carton à dessin , la grande mallette de contreplaqué à la main.

    Trois hommes en noir m’entourent aussitôt et me demandent mes papiers…je pose mes affaires à mes pieds , fouille dans mes poches et sors ma carte d’identité…il faut préciser que je suis natif d’Alger , je m’attends au pire…brutalement celui qui se tient derrière moi me plie les bras dans le dos pendant qu’un autre me fouille sans ménagement…on m’ordonne d’ouvrir ma valise, pleine de tubes de couleurs , de pinceaux , de craies , de fusains et de crayons…ils s’en saisissent , la retournent et la vident en riant sur le quai.

    Alors qu’ils partent à la recherche d’une autre victime , à quatre pattes au milieu de mégots et vieux tickets , je ramasse mes instruments de travail pour les remettre en place avant que quelqu’un ne marche dessus , espérant qu’aucun ne soit tombé sur la voie et ne pas en oublier , parce que le moindre de ces objets coûte de l’argent….et l’argent c’est ce dont je suis le plus démuni.

     

    Je viens de terminer l’appel du matin. Comme chaque jour tout au long de ce rite quotidien , la porte d’accès à la salle de cours reste fermée , gardée par mon assistant…les retardataires attendent à l’extérieur que C. prenne leur nom et les laisse entrer l’un après l’autre.

    Debout sur l’estrade , j’observe le manège , je vois passer O. , un habitué , le seul arabe de l’atelier…il est marocain , brillantissime , d’une extraordinaire intelligence , il me fascine…nous connaissons tous son histoire…à l’origine , il était petit gardien de chèvres illettré dans le djebel…tout seul , il a appris à lire , s’est procuré des livres , de plus en plus pointus , s’est présenté au bac qu’il a réussi avec mention , a obtenu une bourse spéciale pour poursuivre ses études à Paris….et aujourd’hui il est là , en retard comme toujours , avec des excuses plus extravagantes les unes que les autres.

     

    Alors O. , c’est quoi aujourd’hui ?

    Tu me croiras pas , Massier , cette nuit mon foyer a sauté ,

    mais tu vois , j’suis pas mort !!

     

    Cette fois , j’étais sûr qu’il ne mentait pas..

     

     

    Un jour ordinaire ... en 61 ...

     


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